Face aux épreuves bénies du chemin, nous pouvons répondre de deux façons,

dont l’une et l’autre se complètent, tandis qu’elles s’opposent… Il est un temps où l’aspirant réagit aux invitations bousculantes de la vie par une utilisation d’outils issus de la compréhension qu’il aura développée à force d’observation et de tentatives d’éclairages des étapes traversées. C’est le temps du polissage de l’ego, du rabotage des aspérités, de celles qui génèrent en fait les obstacles à affronter, dans une résonance parfaite entre ces deux mondes, personnel et environnemental, miroir l’un de l’autre, afin de dessiller le regard du chercheur de clarté… Tandis que l’approche masculine (initiation dorique) se nourrit du besoin de comprendre et analyser avant d’expérimenter, l’approche féminine (initiation ionique)  privilégie la sensation, le ressenti, le contact direct avec les choses de la vie, et c’est lorsque l’expérience aura été traversée, qu’alors, l’intelligence jouera son rôle de clarification.

Pour l’une, masculine, d’abord le recul du penseur. Pour l’autre, féminine, avant tout les sens… On voit bien qu’à ce stade, elles s’opposent, mais pourront se compléter dans le creuset alchimique d’un chemin qui mène au Soi… L’une, comme l’autre, versant duel d’une seule et même Source, cachant chacun en son sein le secret du passage vers l’autre, autorisant alors la magie d’une possible réconciliation de ces deux approches si précisément et subtilement différentes. On voit bien déjà que l’une pointe sa flèche mentale dans un désir de contrôler les épreuves et de les chevaucher comme un cavalier mâterait sa monture, tandis que l’autre aborderait presque charnellement ce qui est traversé, dans un contact sensuel faisant avant tout vibrer les cordes du ressenti. C’est que, là où le masculin ensemence, le féminin permet la croissance de la graine.  Nous sommes dans la dimension féminine du temps qui engrange verticalement, tandis que le temps masculin passe, horizontalement, et donc, il se perdrait sans aucune possibilité d’y revenir… De quoi faire naître des envies de pouvoir, de contrôle, d’impatience à produire, coûte que coûte, là où l’approche féminine du temps s’enrichit de la connaissance patiemment acquise au fil de la vie qui offre son enseignement comme la généreuse pourvoyeuse d’expériences qu’elle est. Il y a cette volonté guerrière d’un masculin bravant l’adversité armé des outils forgés par un ego conquérant, dont les quelques déconvenues apparemment digérées font croire qu’il n’est plus là, alors qu’il a simplement troqué son apparence d’ego négatif contre celle d’ego positif, plus accessible, accueillant, civil, mais toujours éminemment concentré sur le personnel. Il y a aussi dans ce féminin non encore abouti et qui, de fait, alimente l’illusion d’un ego dépassé, une conscience qui se perd aux ressentis nombreux, et dont on souhaiterait que certains soient colorés de transcendance, tandis qu’ils se fondent aux multiples nuances du personnel, encore une fois. C’est que ces deux approches, masculine et féminine, ne sont encore que des étapes de la reconnaissance de l’ego : même positif, il demeure la matière à transformer, à modeler, à éclairer, certainement pas à détruire. Cet ego primaire sera primordial lorsqu’à distance de lui-même, se manifestera ce que le Maître Tibétain, Djwal Khul, nomme le gardien du Seuil : émanation devenue consciente d’une partie de cet ego, veillant à la préparation nécessaire au franchissement de la Porte menant au Soi, à l’Âme, Féminine dans son Essence…    

Et de cela, il ne peut  être question à l’étage précisément où l’ego est né. Ces deux vécus, féminin et masculin, sont des expressions duelles d’un ego séparatiste, utilisant l’un, au détriment de l’autre et vice versa. Et c’est la réconciliation intérieure de ces deux énergies, qui ouvre à l’étape suivante, celle de l’abandon à une forme d’énergie nouvelle et puissante dont le féminin évoqué plus haut est un pâle reflet, aspect idéalisé de la Vision Sacrée d’un Féminin dont la Présence se révèle au décours des épreuves qui se présentent alors sous une autre forme.  Tant qu’il s’agit de reconnaître, appréhender, comprendre les ficelles égotiques, l’environnement extérieur présentera les expériences nécessaires à l’intégration du processus. Puis, au degré suivant, la Vie Une propose alors une confrontation sans pareille avec la somme de ce qui a été semé par le chercheur, et qui gît dans un subconscient cellulaire et néanmoins très actif ! Ce serait comme une montagne surgissant sur le chemin soudainement, alors que l’on pensait la voie dégagée à jamais. Une muraille intérieure, érigée au fil des résistances nombreuses et inventives de l’ego. L’épreuve par excellence, intime, profondément ancrée au cœur de nous-mêmes, et démontrant s’il le fallait, que tout commence à nous, intrinsèquement. Et que le monde révélant son chaos n’est que le miroir de cet énorme obstacle intérieur.

C’est là que les « choses sérieuses » commencent ! C’est là qu’est mesurée la détermination à poursuivre. C’est là qu’aucun outil, masculin ou féminin, précédemment utilisé, ne sera plus d’aucun secours : ni le mental masculin, ni le ressenti féminin, tels qu’envisagés jusque-là ne seront utiles tels quels. C’est là, enfin, que la réconciliation féminin/masculin, entre ces deux énergies vibrant au sein de la femme et de l’homme, viendra offrir sa résonance non-duelle au moment d’un passage qui exigera de ces oppositions nécessaires en leur temps, qu’elles s’unissent en une florissante et vertueuse flambée, calcinant l’obsolète. Ce passage ouvre sur un monde inédit où le Féminin œuvre de Puissance et de Force tandis qu’il rayonne aussi de Douceur et d’Amour. Ce Féminin est l’Essence-même de tout ce qui vit, ce que les Maîtres de Sagesse nomment la Mère du Monde,  le Féminin Absolu. Lorsque le disciple parvient à cette épreuve, seul l’abandon total à ce qui se présente est la réponse. Et cet abandon-là est ABSOLUMENT féminin. Il est aussi l’essence de la capacité à accueillir ce qui est. Il ouvre au possible en chacun à devenir réceptif, qualité féminine et masculine, la réceptivité n’étant pas la passivité, mais la capacité à offrir activement un espace d’accueil, ce qui est bien féminin (offrir) et masculin(activement).

Que l’on soit femme ou homme, la mémoire d’un fruit à faire croître en son sein est vivante. Réelle ou symbolique, cette connaissance vit en chacun pour des raisons diverses dont l’une est le vécu de vies précédentes, et l’autre le fait que nous portons chacun en nous la perception diffuse que nous devons enfanter de nous-mêmes. La Mère du Monde, dont la diffusion se manifeste puissamment actuellement, nous rappelle cette exigence à faire vivre en nous les qualités que ce Féminin Sacré déverse sur nos consciences, afin qu’investis d’Amour et de Sagesse, nous soyons déterminés à œuvrer au sauvetage de notre Terre Mère dont l’abondance nourricière fera défaut si nous ne nous ouvrons pas à cette Manifestation du Féminin, dont l’ère du Verseau témoigne d’une Présence inédite, bien qu’annoncée par les Maîtres, vivante entre autres, dans le Bouddhisme Tibétain sous la forme de Tara, épouse du Bouddha de compassion Avalokiteshvara, déesse qui soulage des difficultés temporelles et guide vers la libération, la fin de toute souffrance.

Alors ! Oui, le Féminin en manifestation  est DÉJÀ le chemin, il nous appelle à l’ouverture d’un cœur, fermé par autant de conflits intestins aux couleurs d’une guerre menée entre nous/féminin et nous/masculin, ces deux aspects dont l’union amoureuse est l’incontournable sésame donnant accès aux précieux arcanes d’un sacre, par le Féminin, œuvrant à une autre Humanité en chacun… et que l’on soit femme, homme, c’est s’offrir tout entier qui compte, dans cet abandon salutaire, teinté c’est sûr de yin, mais soutenu par une détermination éminemment yang, puisqu’à ce moment-là, le Cœur est  la boussole non polarisée d’un être réconcilié en lui-même.  Qu’importe le passé, si vivre le présent est de s’en remettre, sans réserve, au Féminin/Mère du Monde dont l’évidente manifestation nous montre avec justesse, rigueur, beauté et douceur ce qu’AIMER veut dire, pour de plus justes relations humaines, en phase avec la Planète bleue et le Vivant sous toutes ses formes, pour nous offrir un possible futur…